Home » Accueil » ÉDITORIAL – Dimanche 5 décembre 2021 – 2 ème Dimanche de l’Avent – Année C

ÉDITORIAL – Dimanche 5 décembre 2021 – 2 ème Dimanche de l’Avent – Année C

Retrouvez toutes les informations dans la feuille hebdomadaire N°49.

DE VICTIMES À TÉMOINS (II) : LE CHOC

Dans la salle à manger de la maison, il y avait au fond de la pièce à gauche un buffet, avec des crayons, des papiers, et un Petit Robert : mon père nous disait toujours d’aller chercher le sens des mots. J’ai cherché les mots que le père *** m’avait soufflés à l’oreille et leurs définitions, définitions qui étaient très succinctes. Le lendemain, j’ai repris le chemin de l’école, j’étais en 5ème. Je repensais à ce sale week-end, à partir de ce jour, je ne comprenais plus rien en maths, plus rien n’était pareil. Le prof me tapait avec la brosse du tableau ou le dictionnaire me volait dessus. En parler, mais en parler à qui ? Où ? Comment ? Quels mots mettre sur ce qui venait de m’arriver ? Et puis, qui va me croire ?

Cela a duré toute l’année scolaire. Garçon ou fille, sans distinction. 25 petits. Il proférait régulièrement des menaces si nous ne gardions pas le secret. Il était évident que l’enfer nous attendait à coup sûr. Il nous terrorisait et dans le même temps, il faisait figure de héros, fort sympathique et affable au demeurant, aux yeux de nos parents. Il avait gagné leur totale confiance. Que vaut la parole d’un enfant de 9 ans face à celle d’un instituteur aussi habile ? Qui nous aurait crus ?

Et puis une élève s’en est ouverte à ses parents, l’affaire a été révélée, nous étions alors au collège. Je me souviens comme si c’était hier des « ça se sait », nul besoin d’en rajouter. Chacun d’entre nous savait de quoi il était question. Nous sommes en milieu rural et maritime, les hommes sont à la pêche, pendant de longues périodes parfois. Les femmes sont le plus souvent seules face à la responsabilité de l’éducation des enfants aux tâches quotidiennes. Face à ce problème je crois qu’elles étaient perdues, et c’est la honte qui prend le dessus. Non pas la honte par rapport à son enfant, mais la honte par rapport à la communauté. Le monde des croyants.

Et puis un jour ma mère est montée, est entrée dans ma chambre, son air était grave, j’aurais voulu me fondre dans le sol, disparaître. « Alors c’est vrai ce qui se raconte ? », j’ai répondu par la positive et voilà. Il n’en a plus jamais été question. …/…

Le rapport Sauvé est accompagné d’un recueil de paroles de victimes intitulé « De victimes à témoins ». Pourquoi cela ? Parce que le silence a environné ces crimes et que c’est la prise de parole de victimes qui a ouvert la parole dans l’Église. Il est donc important de commencer par écouter. C’est le but de cette série d’éditoriaux.

P. Régis, vicaire

Diocèse de Lyon

Flux L’Evangile quotidien

  • Évangile : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel » (Jn 6, 44-51)

Le saint du jour