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ÉDITORIAL du 30 mars 2025 – 4e dimanche de carême – Année C – Laetare

Le dimanche Laetare correspond au quatrième dimanche de Carême, la couleur liturgique est le rose qui évoque la joie.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 15,1-3.11-32

Or le fils aîné était aux champs. Quand il revint et fut près de la maison, il entendit la musique et les danses. Appelant un des serviteurs, il s’informa de ce qui se passait. Celui-ci répondit : “Ton frère est arrivé, et ton père a tué le veau gras, parce qu’il a retrouvé ton frère en bonne santé.” Alors le fils aîné se mit en colère, et il refusait d’entrer.

Peut-on encore dire quelque chose sur la parabole du fils prodigue ?

C’est une parabole et non pas une histoire, ce qui veut dire que le sens de ce texte s’inscrit bien au-delà du récit qu’il fait. Le récit du fils prodigue n’est pas isolé : il fait partie d’un ensemble de trois paraboles qui marquent une progression dans l’attention de Dieu pour sa création. Nous partons du cent pour un avec la brebis perdue, au dix pour un avec la drachme égarée, pour finir avec le un pour un avec le retour du fils.

La sollicitude de Dieu est pour chacun individuellement. Chaque acteur de ce texte a un rôle précis et particulier qu’il nous est facile de transposer. Dieu le Père – en sa personne du Fils dans la trinité – le fils aîné – l’humanité qui se détourne de la volonté du père – le fils cadet qui revient vers la source de l’amour après avoir vécu hors de cette dernière. Les serviteurs, les hommes et les femmes de tout temps qui sont porteurs de bonnes nouvelles et qui se réjouissent de la joie du maître.

La question qui nous est toujours posée est : à qui nous identifions-nous ?

Sans doute pas au Père, nous n’oserions avoir une telle prétention, plus facilement à l’un des deux fils, tour à tour, en fonction des évènements de la vie. Mais jamais aux serviteurs.

Je nous invite à faire ce décentrement. Il n’y a rien de glorieux à être un serviteur… Dans cette parabole, ils ont un rôle mineur, voire insignifiant, on pourrait se passer d’eux et l’histoire ne s’en trouverait nullement modifiée… Et pourtant. Les serviteurs sont là pour transmettre la bonne nouvelle. Sans eux, chacun serait dans l’ignorance de ce qui arrive. Ils sont les messagers témoins, les disciples missionnaires.

Ils assument le rôle, parfois ingrat, d’être là et de proclamer la bonne nouvelle. Sans forcément en faire partie. Mais ils sont heureux devant la joie du maître, et sans doute aussi ils ont compati à sa peine. Nous devrions trouver en ces serviteurs une figure qui devrait nous convenir. Accepter d’être passeurs de la bonne nouvelle.

Les serviteurs sont aussi témoins de l’œuvre de l’Esprit Saint dans le cœur de chacun. Si nous acceptions parfois d’endosser cette mission, sans doute que la nouvelle de l’amour de Dieu pourrait se répandre autrement. Ils n’ont pas peur d’être interpellés, ils répondent en toute vérité. Et ils savent s’éclipser pour laisser la place à celui qui agit dans les cœurs.

Nous comprenons maintenant aussi pourquoi le Seigneur nous confie la tâche de serviteurs de si nombreuses fois dans l’Évangile… À nous de nous réjouir en voyant Dieu à l’œuvre au sein de cette humanité qui se cherche et qui aspire à la paix.

Revêtons le rose de la liturgie de cette fin de semaine pour nous réjouir de cette joie profonde qui nous inonde lorsque nous sommes témoins d’un retour vers Dieu.

Père Jorge JIMENEZ

Comme au dimanche de Gaudete au milieu de l’Avent, l’Église fait une pause dans la pénitence quadragésimale, au quatrième dimanche de carême (soit à la mi-carême) appelé le dimanche de « Laetare », pour mieux se hâter vers les joies pascales.

ÉDITORIAL du 16 mars 2025 – 2 e dimanche de carême – Année C

Ecoutez l’homélie du Père Jorge JIMENEZ

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 9, 28b-36

En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il gravit la montagne pour prier. Pendant qu’il priait, l’aspect de son visage devint autre, et son vêtement devint d’une blancheur éblouissante. Voici que deux hommes s’entretenaient avec lui : c’étaient Moïse et Élie, apparus dans la gloire. Ils parlaient de son départ qui allait s’accomplir à Jérusalem. Pierre et ses compagnons étaient accablés de sommeil ; mais, restant éveillés, ils virent la gloire de Jésus, et les deux hommes à ses côtés.

Nous voici présents à la scène de la transfiguration. Pierre, Jacques et Jean sont les seuls témoins de cette manifestation. Jésus, Moïse et Élie en sont les acteurs.
Luc a fait son travail de journaliste : après la résurrection de Jésus, il nous livre le récit tel que la mémoire des disciples peut s’en souvenir.
Comment décrire cette expérience à nulle autre pareille ? Les mots sont pauvres pour exprimer ce que ces hommes -qui, par ailleurs, sont terrassés par la fatigue – viennent de vivre. Nous sommes invités à entrer dans une narration spirituelle plus que dans un récit.
Le carême vient de commencer et la liturgie nous révèle d’une manière particulière quelle va être la fin de ce parcours. Le texte nous indique quelle est la teneur de la discussion entre ces trois personnages : « Ils parlaient de son départ [de Jésus] qui allait s’accomplir à Jérusalem ».
Avec les disciples, nous sommes sortis du temps, nous avons directement accès à la fin de l’histoire. Jésus monte à Jérusalem pour vivre sa pâque. Il va être arrêté, jugé condamné, exécuté et le troisième jour, Dieu va le ressusciter d’entre les morts.
Nous sommes conduits à contempler Jésus sorti du cours du temps. Ressuscité, il s’entretient avec deux des plus grands prophètes de l’histoire d’Israël : Moïse, le libérateur qui a entraîné son peuple hors des griffes de l’Égypte et Élie, le prophète de l’amour jaloux pour Dieu, héraut de la vérité et de la justice.
L’un et l’autre ont marqué le temps et sont sortis du temps : Moïse en regardant son peuple traverser le Jourdain et Élie en s’envolant sur un chariot de feu.
Tous trois sont présents devant les disciples et évoquent l’inconcevable. La vie l’emporte sur la mort. L’amour jaloux de Dieu va faire que son Fils Jésus sera libéré des entraves de la mort et manifestera en lui la résurrection.
« Il est bon que nous soyons ici ». Avec les disciples, nous avons vu le temps s’arrêter et la promesse se réaliser. Notre ennemie la mort est terrassée et l’amour de Dieu se manifeste pour son Fils. « Dressons trois tentes » : arrêtons le cours de la vie, rien ne pourrait être plus parfait que cet instant. La certitude que la promesse de Dieu se réalise.
Malheureusement, Dieu tire les disciples, et nous aussi, du sommeil et du monde des rêves qu’il faut traverser comme la nuée. La transfiguration est cette manifestation concrète de la fin des temps. Il nous faut sortir de la brume et écouter les paroles du Père. Nous ne devons pas vouloir arrêter le temps, mais vivre résolument dans ce temps. Le Christ doit accomplir son geste pour le salut de l’homme et nous devons accueillir la manifestation salvifique de la transfiguration.
Le carême nous permet d’avoir le cœur en éveil et nous permet d’entrevoir le dessein de Dieu. Vivons l’aujourd’hui de la promesse de Dieu et entrons dans l’espérance de sa réalisation à la fin des temps.

Père Jorge JIMENEZ

Dimanche 9 mars 2025 – 1er dimanche de Carême

Ecoutez l’homélie du Père Jorge Jimenez

L’Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (4, 1-13)

« Dans l’Esprit, il fut conduit à travers le désert où il fut tenté »

En ce temps-là, après son baptême, Jésus, rempli d’Esprit Saint, quitta les bords du Jourdain ; dans l’Esprit, il fut conduit à travers le désert où, pendant quarante jours, il fut tenté par le diable. Il ne mangea rien durant ces jours-là, et, quand ce temps fut écoulé, il eut faim. Le diable lui dit alors : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne à cette pierre de devenir du pain. » Jésus répondit : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain. »
Alors le diable l’emmena plus haut et lui montra en un instant tous les royaumes de la terre. Il lui dit : « Je te donnerai tout ce pouvoir et la gloire de ces royaumes, car cela m’a été remis et je le donne à qui je veux. Toi donc, si tu te prosternes devant moi, tu auras tout cela. » Jésus lui répondit : « Il est écrit : C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, à lui seul tu rendras un culte. »
Puis le diable le conduisit à Jérusalem, il le plaça au sommet du Temple et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, d’ici jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi, à ses anges, l’ordre de te garder ; et encore : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. » Jésus lui fit cette réponse : « Il est dit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »
Ayant ainsi épuisé toutes les formes de tentations, le diable s’éloigna de Jésus jusqu’au moment fixé.

ÉDITORIAL pour le mercredi des Cendres – 5 mars 2025

Ecoutez l’homélie du Père Jorge Jimenez

Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 6, 1-6.16-18

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Ce que vous faites pour devenir des justes, évitez de l’accomplir devant les hommes pour vous faire remarquer. »

Nous revoilà – déjà ! – au mercredi des Cendres, pour nous cette année en plein cœur des vacances d’hiver. Je ne sais pas si, entre deux visites à la famille, ou deux descentes de ski plus probablement, nombreux sont ceux qui vont se souvenir qu’après le Mardi gras vient le mercredi des Cendres. L’évangile de ce jour est bien connu, avec ces trois motifs : l’aumône, la prière et le jeûne. Je nous invite cette année à lire plus précisément l’introduction : « Ce que vous faites pour devenir des justes ».

Le carême nous est offert non pas pour que nous fassions des exploits, mais pour nous permettre de devenir des justes ou, en d’autres termes, pour nous ajuster à Dieu.

Il est clair que la vie ordinaire a une fâcheuse tendance à nous éloigner des buts spirituels que nous nous sommes fixés. L’oraison quotidienne, la messe hebdomadaire, le souci des plus pauvres et une consommation responsable ont trop vite volé en éclats face à la complexité de la vie quotidienne et des exigences qu’elle comporte, et que nous acceptons parfois à notre corps défendant.

Jésus nous demande de devenir des justes. Il faut bien sûr avoir en tête ce que peut signifier cette appellation. Il y a, historiquement, les Justes parmi les nations, ceux qui ont œuvré à la protection des personnes juives pendant la seconde guerre mondiale. Sans aller jusque-là, il y a de cette justice pour Dieu qu’il nous faut voir et appliquer.

Être juste, c’est donc être ajusté à Dieu. Craindre Dieu, expression utilisée dans les textes du Premier Testament, c’est craindre d’être séparé de Dieu, de s’éloigner de lui, de le reléguer au second, voire au énième plan. Le carême nous offre ces jours pour revisiter notre relation à Dieu en passant par trois prismes très concrets.

Le prisme de la prière est évident. Rejoindre Dieu au quotidien dans un temps de cœur à cœur. Les textes de la messe peuvent nous aider efficacement. De très bonnes applications nous offrent les textes du jour sans autre effort pour nous que de les consulter.

Le prisme de l’aumône est omniprésent : jamais nous ne recevrons plus de sollicitations que pendant ces semaines. Donner, il faut donner. Je suis d’accord, il faut accepter de se simplifier et de partager.

Le carême est surtout l’occasion de faire le tri et de voir ce qui nous encombre et ce qui nous retient.

Il y a des biens matériels qui sont des prisons, et accepter de s’en séparer peut être salvifique. Et enfin, le prisme du jeûne. Le jeûne qui est devenu une mode. Il y a des jeûnes organisés, des jeûnes accompagnés, des jeûnes pour réveiller en soi je ne sais quelle capacité. Le jeûne du carême n’est pas de cette famille : il est celui de la pauvreté. Le jeûne du pauvre qui ne remplace pas un bout de viande par un poisson hors de prix. Le jeûne qui a pour finalité de faire entrer dans sa vie de la simplicité. Et celle-ci commence par la table qui peut devenir non pas le lieu de la privation, mais celui du choix conscient. Je choisis ce que je mange et je laisse de la place. Parfois simplement à une discussion familiale ou à un ami…

Le Seigneur nous invite à cela sans ostension, dans le secret, car c’est dans le secret que le Seigneur nous espère. Secret de notre prière, de notre disponibilité et de nos choix.

Père Jorge JIMENEZ

Editorial du 23 février 2025 – 7e dimanche du Temps Ordinaire – année C

Ecoutez l’homélie du Père Jimenez

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 6, 27-38

« En ce temps-là, Jésus déclarait à ses disciples : « Je vous le dis, à vous qui m’écoutez : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent. Souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient. À celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre joue. À celui qui te prend ton manteau, ne refuse pas ta tunique. Donne à quiconque te demande, et à qui prend ton bien, ne le réclame pas. Ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites-le aussi pour eux. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle reconnaissance méritez-vous ? Même les pécheurs aiment ceux qui les aiment. Si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quelle reconnaissance méritez-vous ? Même les pécheurs en font autant. Si vous prêtez à ceux dont vous espérez recevoir en retour, quelle reconnaissance méritez-vous ? Même les pécheurs prêtent aux pécheurs pour qu’on leur rende l’équivalent. Au contraire, aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Alors votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car lui, il est bon pour les ingrats et les méchants. Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux. Ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés. Pardonnez, et vous serez pardonnés. Donnez, et on vous donnera : c’est une mesure bien pleine, tassée, secouée, débordante, qui sera versée dans le pan de votre vêtement ; car la mesure dont vous vous servez pour les autres servira de mesure aussi pour vous. »

Pour moi, c’est impossible !

Effectivement, ce que demande l’Évangile de ce jour paraît irréalisable aux pauvres hommes et femmes que nous sommes.

La barre est trop haute : aimer, faire du bien, pardonner, donner – à la limite à un membre de la famille ou à un ami – , pourquoi pas, mais au tout venant, sûrement pas ! Je vous l’accorde, ma réponse est sans doute un rien excessive, mais ne reflète-t-elle pas ce que nous n’osons dire en public ?L’exigence du Christ n’est pas pour les tièdes. Et, trop souvent, nous sommes des tièdes. Pas de mauvaises gens, pas des profiteurs ou des indifférents, mais simplement des personnes installées, qui protègent leur petit monde parfois acquis à force de travail et de privations.

Alors pourquoi Jésus ne prend-il pas en compte la réalité humaine qu’il est censé connaître mieux que quiconque ? Sans doute parce qu’il la connaît mieux que nous ! Les freins que nous nous mettons ne sont que des peurs que nous imaginons. Bien sûr, il nous arrive d’être déçus par les autres, mais souvent par nous-même. Nous sommes nos premiers ennemis, nous limitons notre possible et nous freinons les capacités que Dieu a mises en nous.

Quand le Christ nous demande de sortir de nos ornières, ce n’est pas pour nous enfermer dans nos préjugés. Il nous demande d’être simplement à son image, nous qui sommes à sa ressemblance. Aimer, pardonner, et ouvrir un avenir, n’est-ce pas le propre des fils et des filles de Dieu que nous sommes ?

Jésus nous invite à entrer dans l’espérance d’un monde où chacun est acteur de l’épanouissement de l’autre. Il y a de nombreux lieux où nous pouvons servir à la promotion de l’homme et de tout homme.

  • Le pardon est le premier, car il est un vecteur efficace de l’amour.
  • Le don est le second, car il est en nous l’œuvre même de Dieu.

C’est avec cette mesure que nous serons jugés : sur notre capacité d’aimer et de nous laisser aimer, et cela ce n’est pas au-delà de nos forces, car c’est notre identité de fils et fille de Dieu.

Père Jorge JIMENEZ

ÉDITORIAL du 16 février 2025 – 6e dimanche du Temps Ordinaire – année C

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 6, 17.20-26

« Mais quel malheur pour vous, les riches, car vous avez votre consolation ! Quel malheur pour vous qui êtes repus maintenant, car vous aurez faim ! Quel malheur pour vous qui riez maintenant, car vous serez dans le deuil et vous pleurerez ! Quel malheur pour vous lorsque tous les hommes disent du bien de vous ! C’est ainsi, en effet, que leurs pères traitaient les faux prophètes. »

Nous avons, dans cet évangile de Luc, non seulement les Béatitudes, comme nous pouvons le trouver dans l’évangile de Matthieu, mais aussi leur pendant en malheur. Nous ne pouvons pas penser que Jésus maudit qui que ce soit. Il ne s’agit pas de malédictions à venir mais d’un constat, qui peut nous paraître cruel mais, à y bien réfléchir, tellement vrai et d’une actualité insolente.

Jésus regarde ceux qui se présentent devant lui et, bien malheureusement, il leur dit ouvertement ce qu’ils sont en train de vivre. Jésus nous fait part de ses émotions en regardant le peuple, les uns et les autres. Il y a les bienheureux, à qui une promesse est faite et ceux qui ont laissé leur cœur hors d’atteinte.

Vous êtes malheureux, vous qui trouvez votre consolation dans les richesses Vous amassez aux dépens des autres en ignorant le cri de vos frères. Votre horizon se limite à ce que vous possédez et ce même horizon devient votre unique intérêt. Votre seul ami est inerte et sans vie. Il va vous transformer comme lui, inerte et froid. Vous êtes vivant mais déjà mort.

Vous êtes malheureux, vous qui vous remplissez le ventre sans laisser de place à votre table pour vos frères qui crient famine à votre porte. Il y a la faim du corps, mais il y a surtout la faim de l’âme, et cette dernière, vous l’avez fait taire par le bruit incessant de votre mastication. Repus, vous ne pouvez plus vous déplacer pour tendre une main. Absorbé par ce que vous absorbez. Vous êtes vivant mais déjà mort.

Vous êtes malheureux, vous qui riez de tout, et de la vie en particulier. Plus rien n’a d’importance à vos yeux, tout est occasion de plaisanteries et de bons mots. Rien ne vous atteint, vous vous êtes blindés. Le rire est votre arme de destruction massive et avec, vous détruisez ceux qui vous côtoient. Ils n’ont pas d’existence à vos côtés. Il n’y a que vous dans un grand éclat de rire. Vous êtes vivant mais déjà mort.

Vous êtes malheureux, vous qui ne recherchez que les flatteries de ceux qui vous entourent. Il y a du monde à vos côtés, il y a du monde à votre table, il y a du monde dans votre vie, mais ils ne sont là que pour flatter votre orgueil. Ils doivent absolument être de votre côté, rire de vos blagues, aimer ce que vous aimez, sinon… ils sont chassés d’un revers de manche et réduits à néant. Vous êtes vivant mais déjà mort. Tous, vous êtes seuls.

Le Christ nous invite à vivre pleinement et en vérité. Avec nos frères, pour nos frères. Jésus nous demande d’avoir des relations vraies. Des relations bienveillantes. Il nous demande de regarder le prochain comme un autre soi-même, comme un autre lui-même, comme un autre Christ et Seigneur. Ainsi, les Béatitudes deviendront notre véritable horizon de vie.

Père Jorge JIMENEZ

ÉDITORIAL du 9 février 2025 – 5e dimanche du Temps Ordinaire – année C

Ecoutez l’homélie du Père Jorge Jimenez


Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 5, 1-11

À cette vue, Simon-Pierre tomba aux genoux de Jésus, en disant : « Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur. » En effet, un grand effroi l’avait saisi, lui et tous ceux qui étaient avec lui, devant la quantité de poissons qu’ils avaient pêchés ; et de même Jacques et Jean, fils de Zébédée, les associés de Simon. Jésus dit
à Simon : « Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras.» Alors ils ramenèrent les barques au rivage et, laissant tout, ils le suivirent.

Nous avons en Luc l’appel des premiers disciples. Cette fois, c’est un lot complet qui suit Jésus après la pêche miraculeuse.
Jésus enseigne. Mais pour que tous l’entendent, il prend une barque et s’éloigne du rivage. Nous le savons, la mer et la mort sont liées. Jésus enseigne sur la mer, et peut-être parle-t-il de notre ennemie, la mort.
Les pêcheurs, à qui Jésus emprunte la barque, ont pêché toute la nuit et ils n’ont rien pris. Ils lavent leurs filets, la journée de travail est finie, le jour s’est levé et pour eux rien, une journée de perdue, une journée morte.
Voilà que ce Jésus leur demande de faire une nouvelle journée de travail, en plein jour.À la vue de tous. Ils obéissent. Sur la parole de cet homme, ils vont jeter de nouveau leur filet : en plein large, loin du rivage, là où l’on ne s’attend pas à prendre du poisson. Par grand fond, le filet se remplit, prêt à se déchirer. Ils ont besoin d’aide. Les deux barques sont remplies. Jésus est dans la barque, les pêcheurs et les poissons aussi. Simon-Pierre se reconnaît pécheur, ce n’est plus son métier mais son état. Pierre a reconnu son incapacité et Jésus lui donne une mission : il va maintenant pêcher des hommes.
Nous pouvons tirer plusieurs enseignements de cet épisode. Jésus vient donner la Parole de Dieu. Nombreux sont ceux qui sont en attente d’une parole de réconfort et de vie. Jésus trouve la bonne distance pour enseigner. Il nous invite nous aussi à trouver la bonne distance pour annoncer la Parole de Dieu. Parfois, il faut accepter de prendre de la distance pour que la Parole trouve un écho dans la vie des personnes. Pierre obéit. Il y a cette Parole qui s’impose à nous. La Parole est exigeante et nous déplace, elle nous demande une conversion, qu’il faut les premiers accepter. La Parole ne pourra s’adresser à nos frères, aux foules, que si nous nous laissons toucher par elle. Comme Pierre, nous nous découvrirons incapables de porter la Parole… Alors elle pourra agir en nous, et fera de nous, sinon des pêcheurs d’hommes, au moins des porte-Parole pour nos frères. Il ne nous faudra jamais oublier que le Christ est dans la barque. Que de fois nous voudrions la mener sans lui, et nous passons notre temps à nous épuiser plutôt que de le laisser conduire.
Le Christ nous demande de mettre nos forces dans sa barque pour manifester son amour et sa miséricorde.
En ce dimanche de la santé, que cette force d’amour vienne auprès de nos frères malades en attente d’une parole d’espérance, que seul le Christ peut donner par notre engagement à leur service.

Père Jorge JIMENEZ

ÉDITORIAL du 2 février 2025 – Présentation de Jésus au Temple

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 2, 22-40

Quand fut accompli le temps prescrit par la loi de Moïse pour la purification, les parents de Jésus l’amenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, selon ce qui est écrit dans la Loi : ‘Tout premier né de sexe masculin sera consacré au Seigneur.’ Ils venaient aussi offrir le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur : un couple de tourterelles ou deux petites colombes.

Allez-vous faire sauter des crêpes en cette fin de semaine, pour la Chandeleur ?

La fête que l’Église nous fait vivre aujourd’hui est double. Il s’agit du rachat de l’enfant et du rite de purification de la mère.

Reprenons les éléments du judaïsme. Tout enfant mâle est consacré à Dieu, c’est le sens de la circoncision, au huitième jour de l’enfant.

Quand il s’agit du premier-né, le père doit aussi racheter son garçon. Le rachat du fils est l’un des 613 commandements, qui est célébré après le 31e jour de l’enfant. Cette cérémonie consiste pour le père à racheter symboliquement son propre fils à un Cohen, c’est-à-dire un des prêtres du Temple de Jérusalem, ce qui le dispense d’obéir au commandement selon lequel tous les premiers fils avaient pour obligation de devenir prêtre.

Il s’agit aussi pour la mère de l’enfant d’offrir le sacrifice de purification après l’accouchement. La mère de l’enfant peut à nouveau toucher des objets sacrés et se rendre au temple. Elle peut aussi redevenir épouse, l’impureté rituelle est finie.

L’évangéliste nous présente ce double rite qui permet de parfaitement ancrer Jésus dans la tradition et la loi juives.

Lors de cet épisode, nous devons aussi prêter attention aux deux anciens, Syméon et Anne. L’un et l’autre ont une signification très précise dans ce contexte.

Prenons Syméon, le prêtre. Il est conduit au Temple par l’Esprit pour attendre la consolation d’Israël. Cette consolation se manifeste par un enfant. C’est lui qui vient remettre toutes choses en ordre. Il accomplit les promesses d’Isaïe lors de la déportation. Avec cet enfant, le peuple de Dieu va connaître de nouveau un temps de grâce et de justice. Syméon reçoit cet enfant dans les bras et prononce son cantique : il peut mourir en paix, la promesse de Dieu s’est enfin manifestée.

Pour Anne, nous sommes en présence d’une veuve qui attend le messie. Elle a connu tous les âges de la vie, comme Israël : le temps de l’élection, le temps du vivre avec et maintenant le temps du vivre sans, sans époux ou sans Dieu. La vie d’une prophétesse manifeste l’action prophétique tout autant que sa parole. Anne attendait une vie nouvelle et un retour à la vie avec Dieu, tout comme Israël.

Voilà cette attente achevée. Cet épisode de la Présentation est d’une richesse infinie.

  • Jésus est libéré d’un avenir qui le contraignait. Sa vie peut maintenant s’épanouir sous le signe de l’Esprit Saint.
  • Marie retrouve sa condition de mère et d’épouse, elle va surtout pouvoir se consacrer pleinement à son fils, le seul saint, le seul temple, présence véritable de Dieu.
  • Anne et Syméon manifestent par leur vie que la longue attente du peuple juif vient de s’achever. Dieu se manifeste dans le Temple pour inaugurer l’alliance nouvelle.

Forts de tous ces éléments, nous pouvons bel et bien faire des crêpes et les manger. Car elles sont le signe la fête annoncée, mais aussi la fin du port du voile qui marque le temps du deuil et de la séparation.

Père Jorge JIMENEZ

Dimanche 26 janvier 2025 – 3eme dimanche du Temps Ordinaire

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 1,1-4.4,14-21.

Il ouvrit le livre et trouva le passage où il est écrit : ‘L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur.’ Jésus referma le livre, le rendit au servant et s’assit. Tous, dans la synagogue, avaient les yeux fixés sur lui. Alors il se mit à leur dire
: « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. »

Quelle chance avons-nous en ce début d’année Jubilaire d’entendre cet évangile qui reprend les éléments de l’année jubilaire !
Toutes les semaines d’années, c’est-à-dire sept fois sept années, la cinquantième année est déclarée année jubilaire. Cette année est une année de remise à zéro. Tous retrouvent le nécessaire et le suffisant pour vivre. Les terrains sont redistribués, les dettes remises, etc…
Nous sommes dans un idéal qui ne semble pas avoir été vécu en Israël, malgré la prophétie d’Isaïe. Pourtant il s’agit bien de cette prophétie que Jésus dit s’accomplir aujourd’hui. Que se passe-t-il donc entre la parole politique d’égalité et la promesse de Jésus ? Pourquoi Israël, qui se veut modèle pour les nations, n’a pas été capable d’accomplir cette redistribution ordonnée par le Seigneur, qui s’accompagne également d’un retour à la liberté et à la santé de tous ?
La réponse est simple et cruelle : c’est à cause de la dureté du cœur de l’homme. Qui accepterait une spoliation de ses biens même au profit de l’un de ses frères ?
Jésus, debout, dans la synagogue à Capharnaüm fait cette lecture et annonce son accomplissement.
Véritable défi au bon sens, à la tradition et au sens commun.
Pourtant chaque parole de cette annonce s’est réalisée en Jésus.
L’Esprit du Seigneur est sur moi, n’avons-nous pas encore dans l’oreille la proclamation du Fils bienaimé entendue le jour du baptême ?
Quels sont et quels ont été les premiers bénéficiaires de la bonne nouvelle ? N’est-ce pas les bergers de Bethléem et les hommes et les femmes en attente d’espérance sur les terres de Galilée ?
N’avons-nous pas été témoins de libérations, de démons jetés loin de corps d’hommes et de femmes pris en otage par des addictions ou autre?
L’aveugle n’a-t-il pas retrouvé la vue et le grabataire ne s’est-il pas levé prenant son brancard sous le bras ?
Ne sommes-nous pas témoins de tout cela, hier dans l’Évangile, et aujourd’hui dans cette bonne nouvelle proclamée aux extrémités de la terre ? Combien de guérisons physiques ou psychiques réalisées au nom de Jésus, de peuples libérés, de vies retrouvées ?
Le Pape François veut faire de nous des pèlerins d’Espérance en cette année Jubilaire qu’il vient d’ouvrir. Allons-nous faire comme les habitants de Capharnaüm, dans la suite de l’Evangile, maugréer et vouloir pousser Jésus du haut d’un escarpement, parfois l’escarpement même de nos cœurs, ou accueillir cette parole et rendre grâce au Seigneur pour son action toujours renouvelée ?

Jorge JIMENEZ

Dimanche 19 janvier 2025 – Deuxième dimanche du temps ordinaire

Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean 2,1-11.

En ce temps-là, il y eut un mariage à Cana de Galilée. La mère de Jésus était là. Jésus aussi avait été invité au mariage avec ses disciples. Or, on manqua de vin. La mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont pas de vin. » Jésus lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue. » Sa mère dit à ceux qui servaient : « ‘ Tout ce qu’il vous dira, faites-le ».

La soirée du 31 décembre n’est pas loin et peut être aussi le souvenir de ce qui nous a été offert lors du repas.
Les agapes de fin d’année peuvent se comparer à celles d’un mariage, l’invitation d’une personne qui tient à notre présence, la joie des retrouvailles, la musique, les rires et bien évidement le repas.
Tout est en place pour que ce moment soit inoubliable, sauf qu’ils n’ont plus de vin.
Le drame se profile, il ne s’agit pas de boire comme des outres vides mais de se laisser enivrer un peu, histoire de trouver le moment un peu plus magique qu’il ne l’est, sans bien sûr perdre sa dignité. Ceux qui vont la perdre, de manière certaine, ce sont les organisateurs de la fête. Ils n’ont pensé à rien. Et la fête devient un cauchemar.
« Faites tout ce qu’il vous dira ». Voici une parole surprenante.
Une invitée se permet de donner des ordres. Une femme de qui plus est, qui n’a rien à voir avec l’organisation, elle est simplement là, avec son Fils et ses amis.
Marie est attentive, elle ressent les émotions et entend le désespoir de ceux qui sont là.
Marie sait qui peut venir combler les désirs légitimes de chacun : Jésus.
Mais lui le sait-il ? Mon heure n’est pas encore venue !
Quand le sera-t-elle ? Jésus attend un signe, mais de qui ?
Le signe est là et il se manifeste dans le désarroi des convives, il se manifeste par cette fête déçue il se manifeste par la joie gâchée.
Qu’y a-t-il de toi à moi, dit une traduction littérale de ce passage ? Ce qu’il y a entre Jésus et sa mère est un lien indéfectible. Elle exprime ce que tous ressentent. Elle est ce canal par lequel les prières arrivent directement au cœur de son fils.
Nul ne sait pourquoi Jésus à cet instant a obéi à la demande de sa mère. A-t-il compris qu’il devait assumer son rôle dans ce monde ?
Jésus le sauveur, vient non pas sauver la fête, mais rendre l’espérance à ceux qui l’ont perdue. Il vient manifester que tout est possible, y compris changer l’eau en vin.
Il vient relever ceux qui étaient perdus, le maître du repas qui aurait vu sa réputation altérée par cette faille.
Mais surtout il devient le serviteur des projets de chacun en nous donnant de vivre la joie du Royaume dont le banquet des noces et nos banquets sont le signe dès ici-bas.
Jésus à cet instant manifeste sa gloire, ce repas est le programme de sa vie, et les disciples crurent en lui.

Jorge JIMENEZ

Diocèse de Lyon

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  • Évangile : « Aussitôt l’homme fut guéri » (Jn 5, 1-16)

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